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Par Étienne Hallé
Saint-Nicolas, en
banlieue de Québec
Octobre 2006
Cinq heures moins
trois, le travailleur dépose son balai contre le mur derrière son poste de
travail. Encore une journée à tenter d’assouvir la faim insatiable d’une
machine; une journée de plus à transpirer sous la chaleur accablante de
juillet, une journée de moins à sa vie. Seulement trois minutes le séparent
de sa délivrance; pas celle qui suspend le travail jusqu’au lendemain; non
plus celle qui lui laisse deux jours pour vaquer à ses tâches familiales;
mais trois semaines complètes de totale liberté. Dans trois minutes,
résonnera entre les murs de l’usine la fin de sa journée; la même sonnerie
qui annonce le début de sa journée aura un tout autre son à son oreille. Ce
sera le son de la libération, le son du temps qui lui appartiendra enfin
dans sa totalité. Bien sûr, les jours et les semaines défileront comme
toujours passe le temps, trop rapidement, lui glissant entre les doigts...
mais après viendront deux lundis de congé, puis les fêtes : deux semaines.
Ces vacances et congés payés, unique compensation cédée au travailleur pour
une année de dur labeur, sont ses seules vraies récompenses: son salaire ne
lui permettant que de vivre assez décemment pour lui conserver un degré de
confort et de bien-être lui permettant de donner une performance au travail
bien appréciée de son patron. Ça y est, ça sonne. C’est enfin terminé, la
vie s’ouvre pour trois semaines; elle s’ouvre temporairement, mais enfin...
elle s’ouvre.
J’entends la voix du
patriarche qui ronronne d’un ton monocorde. Un autre timbre s’ajoute à ce
grincement : plus clair, celui-ci. Mais ma parole, serait-ce les voix du
patriarche et du curé ? Mais oui, cette façon de s’exprimer, qui rappelle
le « Passe-montagne » de mon enfance, est bien celle du gardien de la vertu
souverainiste : Notre curé à tous, Joseph Facal. Et le ton rassurant du
patriarche que j’entends nous mettre en garde contre le péché de l’oisiveté
et de la paresse nous vient de Notre Père à nous tous, québécois et
québécoises : de Lucien Bouchard. Quelle chance d’avoir pu ouïr son message
ferme et paternaliste, lui qui a très certainement travaillé très durement
pour un patron qui lui versait probablement un salaire moyen ou peut-être
même sous la moyenne. Heureusement que Lucien est là pour nous faire
comprendre que nous, simples travailleurs, ne travaillons pas suffisamment
et pas assez durement. Prenons son exemple!
J’écoute le curé Facal
qui nous éclaire de toute sa lucidité. Je l’entends nous professer la
doctrine de la foi souverainiste, qui doit transcender par le parti sacré,
le Parti québécois. Les solidaires sont des profanateurs, des hérétiques,
des gauchistes, des diables marxistes... au bûcher! Il faut les brûler
avant qu’ils ne sèment le chaos, avant qu’ils répandent le vice du partage
de la richesse, le péché du collectivisme, et qu’ils n’assassinent le
mérite d’être riche de naissance ou de l’être devenu par l’obsession du
travail acharné au détriment du reste. Lui également nous parle de
productivité et d’oisiveté : il doit certainement avoir lui aussi travaillé
durement dans une usine, ou peut-être dans les cuisines d’un restaurant, si
ce n’est pas un magasin à grande surface... c’est certain, il doit savoir
lui aussi de quoi il parle, suivons le!
Le travailleur dans sa
voiture sur le chemin du retour, écoute la radio et, tout en rêvant à ce
qu’il fera de ce temps durement gagné, entends les sermons du patriarche et
du curé. Bizarrement, leurs discours sonnent faux à ses oreilles et change
de poste, tout en se soulageant d’un gaz intestinal trop longuement réprimé.
Pauvres travailleurs, ils ne comprendrons jamais. Heureusement que les
lucides sont là pour les illuminer, heureusement que Notre Père et le
Gardien de la foi souverainiste veillent sur nous. Amen!
Autres document avec une légère touche d'humour :